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Chasseur sachant tweeter : La chasse débattue sur les réseaux sociaux

A chaque période de chasse, le débat ressurgit entre pro et anti-chasses. Le lobbying de la chasse parait archaïque et vieillissant, mais peut reposer sur un nombre d’adhérents qui fait peur à n’importe quel candidat à une élection.

L’intérêt était alors de voir dans quelle mesure le lobbying de la chasse était utile et efficace sur des sphères plus modernes telles que Twitter, tout en gardant un oeil sur les institutions et le parlement.

Conclusions de l’étude

Si les twittos les plus actifs sont clairement les militants et chasseurs pro-chasse, l’impact et les engagements sont les plus forts autour des accidents de chasse qui sont la principale arme médiatique des militants anti-chasse.

L’arène créée par ceux-ci autour de ces événements est refusée par les pro-chasses qui ne sont jamais dans la réaction par rapport à ces pics d’activité. Leur riposte est organisée autour de blogs et de hashtags. Ceux qui se chargent de la promotion de la chasse dans les médias offline (Thierry Coste, Willy Schraen et la fédération nationale des chasseurs) sont très peu actifs sur Twitter.

La scène politique sur Twitter est largement dominée par les narratifs anti-chasse, venus principalement de partis de gauche, proches des tendances écologiques et de la cause animale. Malgré la présence de nombreux chasseurs au sein du parlement, ces derniers ne prennent pas la parole sur Twitter pour défendre ou promouvoir leur pratique.

Enfin, terminons par le chiffre à retenir de cette étude : sur Twitter, un député est exposé à onze fois plus de narratifs anti-chasse que pro-chasse. Enième signe que ce qui compte n’est pas forcément ceux qui crient le plus sur les réseaux sociaux, mais un réseau bien construit et un lobbying direct traditionnel peut parfaitement convenir. La question à poser est : pour encore combien de temps ?

Des débats rythmés par les accidents de chasse

Les principaux pics d’activité se produisent lors de la médiatisation d’accidents de chasse, et notamment lorsqu’ils touchent des personnes non-chasseuses, comme ce fut le cas en février avec une randonneuse tuée dans le Cantal.  De mars à septembre, alors que la chasse est fermée, l’activité est très faible. Le décès de Morgan Keane, en 2020, reste un sujet d’actualité très régulièrement mentionné et suivi, notamment grâce à l’activité du compte Twitter Un jour Un Chasseur.

Les narratifs anti-chasse au centre du débat.

Lorsque les activités anti-chasse et pro-chasse sont séparées, il en ressort une faible corrélation entre les deux groupes. Les acteurs pro-chasse, les chasseurs, ne sont pas davantage mobilisés lors des principaux pics d’activité, notamment à la suite d’accidents de chasse. Il n’y a pas de riposte massive et organisée durant ces évènements.

Ils suivent leur propre agenda, plutôt orienté vers l’actualité politique et associative autour de leur mouvement.

Les prises de paroles les plus partagées sont également dominées par les narratifs anti-chasse. Il s’agit de commentaires issus de comptes militants pour la cause animale. Ce sont des infos choc qui génèrent un important engagement. Ainsi, la volumétrie globale est très largement favorable aux discours anti-chasse : ils représentent 348K mentions sur un an, contre seulement 57K mentions pour les tweets faisant la promotion de la chasse. Ce sont 83,3K auteurs qui ont partagé et diffusé des tweets négatifs envers la pratique de la chasse, contre seulement 4,4K qui y sont favorable.

Une hyperactivité des comptes pro-chasse dédiés au numérique tandis que les comptes fortement médiatiques sont presque absents

Si la grande majorité de l’activité vient des anti-chasse, les comptes pro-chasse sont les plus actifs (mais avec moins d’impact) et sont regroupés autour du compte @ChassePartage, ou des hashtags #ChassePartage / #IlsSachentNousChassons, destiné à critiquer les militants antichasse.

Ainsi, les auteurs de tweets pro-chasse ont rédigé en moyenne 12,9 tweets en faveur de la chasse, contre seulement 4,1 tweets par auteur pour les anti-chasse.

Dans le même temps, les figures traditionnelles du monde de la chasse sont moins présentes sur Twitter. Ainsi, Willy Schraen n’a posté que 3 tweets en 2022 et certaines figures du monde de la chasse en France comme Thierry Coste ne sont pas présentes sur les réseaux sociaux. Chasseurs de France, le compte de la Fédération Nationale des Chasseurs, n’a publié que 62 tweets en 2022 dont la moitié le 22 mars à l’occasion de l’ouverture du congrès de la chasse et de l’audition de plusieurs candidats à la présidentielle.

Au sein du panel Follaw regroupant les comptes les plus influents de la vie politique et de la société civile française, ce sont les anti-chasse qui sont les plus actifs, notamment grâce à la mobilisation de plusieurs candidats aux législatives sous l’étiquette du parti animaliste. En 5ème position, l’on retrouve l’Homme politique le plus actif pour défendre et promouvoir la chasse, Jean-Yves Caullet, président du conseil d’administration de l’ONF et ancien député socialiste jusqu’en 2017. Grâce à ses très nombreux retweets du compte pro-chasse Franc Aller, il est également celui dont les narratifs pro-chasse rencontrent le plus d’échos au sein de l’écosystème des députés français.

Les politiques chassent en meute

Les figures politiques mobilisées sur la question de la chasse sur Twitter sont très majoritairement issues de courants proches de la cause animale. Le parti animaliste, dont la cause animale est au centre du projet politique, est à l’origine de près d’un tiers des tweets venant de la scène politique, grâce à leurs nombreux candidats aux législatives très mobilisés.

A l’échelle individuelle, la même logique est respectée. Les députés les plus mobilisés sont tous liés à la cause animale, et mettent tous en avant des narratifs plutôt anti-chasse.

Exposition des députés

Pour évaluer l’impact du discours des parties prenantes pro et anti chasses, nous avons reconstitué le newsfeed Twitter des députés.

Les narratifs anti-chasse ont bénéficié d’une bien meilleure visibilité. En effet, si les narratifs pro et anti-chasse ont touché un nombre similaire de députés (respectivement 68% et 69,4%), la volumétrie est bien plus importante pour les anti-chasse : en moyenne, un député a été exposé à 11 fois plus de tweets anti-chasse que pro-chasse.

Cette exposition n’est pas uniforme : là-aussi, c’est à gauche que les députés sont le plus en contact avec les narratifs anti-chasse :

Députés ayant reçu le plus d’impressions de tweets anti-chasse

Les narratifs pro-chasse, eux, circulent plus auprès du centre et de la droite.

Députés ayant reçu le plus d’impressions de tweets pro-chasse

Une étude réalisée par Jean Habib

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