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Bilan des amendements : 1ère année de la 16ème législature (Analyse des données)

Contexte 

Le 28 juin 2022 est la première séance marquant l’ouverture de la XVIème législature. Depuis l’apparition du fait majoritaire en 1962, c’est la seconde fois que le Gouvernement n’a pas la majorité absolue à l’Assemblée nationale. Mais la situation est très différente de celle de 1988, puisque la réforme du 24 juillet 2008 a rééquilibré les rapports entre le pouvoir exécutif et le Parlement et, renforcé les droits de l’opposition, changeant ainsi certaines règles, ce qui a un impact d’autant plus important en cas de majorité relative…

Même s’il n’est pas surprenant, sous la Vème République, que l’Assemblée nationale soit le lieu privilégié de confrontations politiques agitées et de multiples techniques parlementaires originales, cette première année de la XVIème législature semble de fait particulièrement inédite, notamment dans son équilibre politique : l’Assemblée parait coupée en trois blocs (les NUPES, la majorité et l’extrême droite). Les groupes LR et LIOT naviguent en fonction des convictions des députés qui les composent, et des textes.

Loin de la bipolarisation provoquée par le fait majoritaire, les rapports de force ont changé et il y a désormais du suspense à chaque vote, car la majorité n’est jamais certaine de l’emporter. En découle un impact direct sur différents outils parlementaires, comme la multiplication des propositions de loi discutée dans l’Hémicycle, le nombre record de motions de censure ou encore l’utilisation des amendements.

Objectif 

Il est proposé de faire un bilan des amendements sur cette première année de XVIème législature, et d’analyser l’utilisation de cet outil dans le cas d’une majorité relative.

Problématiques 

Y a-t-il plus d’amendements déposés sous cette législature ? Les groupes ont-ils des stratégies similaires ? Le taux d’amendements adoptés est-il supérieur à l’ancienne législature ? Qu’en est-il de leur recevabilité ? Quel est l’emploi des amendements fait par le Gouvernement lors de cette première année ?

Méthode 

L’analyse suivante s’appuie sur des données objectives, des statistiques, qui ont été établies par Follaw.sv, service de veille institutionnelle et sociétale, développé par le cabinet d’études et de conseil Saper Vedere.

Les chiffres étudiés datent du 28 juin 2022 au 18 juin 2023 -les députés ayant été élus le 19 juin 2022-, afin d’étudier la première année de la XVIème législature.

Une comparaison pourra également être faite avec les statistiques de la première année de la XVème législature, afin de comparer deux situations différentes : lorsque l’Assemblée nationale est en cas de majorité absolue (XVème législature) ou en majorité relative (XVIème législature). Nous pourrons ainsi voir s’il y a une utilisation différente de l’amendement et une progression dans son emploi.

En revanche, l’enquête se fonde sur des données quantitatives. Elle ne prend pas encore en compte les dispositifs de chaque amendement, ce qui permettrait une étude plus poussée et une comparaison plus fine les types d’amendements débattus. Il peut y avoir un grand nombre d’amendement identiques (amendements lobby, ou choix politique d’un groupe).

L’analyse est effectuée par Mélody Mock-Gruet, auteure du Petit de guide l’amendement (L’Harmattan, 2022), docteure en droit public, ancienne conseillère d’un groupe politique à l’Assemblée nationale.

  1. Le nombre d’amendements déposés
Chiffres
En 2022 : 89 324 amendements ont été déposés alors qu’en 2017 : 37 593
51 731 amendements supplémentaires par rapport à 2017, soit environ 2,4 fois plus
Février 2023 : 21 817 amendements déposés
Octobre 2022 : 15 537 amendements déposés
Au 18 juin,34 554 amendements ont été discutés
Source : Follaw.SV

Analyse

  • Les amendements déposés par les députés sont enregistrés sur ELOI pour une modification d’une proposition de loi et d’un projet de loi. Ils ne sont pas pour autant étudiés. Il faut différencier les amendements déposés, recevables, soutenus, adoptés…
  • 89 324 amendements ont été déposés cette première, en séance et commission confondus. Il y a bien une augmentation significative de dépôts d’amendements par rapport à 2017 (plus de 50 000 supplémentaires).
  • On peut donc soulever une corrélation directe entre composition de l’Assemblée, majorité relative et dépôt d’un nombre d’amendements.
  • Plusieurs impacts :
    • Sur le temps d’étude des projets de loi et des propositions de loi : plus il y a d’amendements, plus un texte demande du temps pour être étudié et débattu correctement en commission ou dans l’Hémicycle.Sur l’intensité du travail parlementaire : un député qui dépose un grand nombre d’amendements peut donner l’impression aux citoyens d’être très actif, avec de bonnes statistiques, sans pour autant avoir un vrai retour sur investissement (peu ou pas d’adoptés ou de recevables).Sur la professionnalisation des collaborateurs de députés et des groupes : l’amendement demande une certaine technicité juridique et un savoir-faire, surtout pour en déposer un grand nombre dans un délai imparti.
    • Sur la gestion par les administrateurs : les fonctionnaires de l’Assemblée ont toujours le même temps pour étudier la recevabilité d’un amendement (souvent 3-4 jours entre la commission et la séance) et l’augmentation de leur nombre a donc un impact sur leur travail, et sur les erreurs d’appréciation…
  • A noter 2 pics : février 2023 et octobre 2022.
    • Sans surprise, ce sont les deux mois où il y a le plus grand nombre d’amendements déposés. Au mois de février 2023, c’est le projet de loi de finances rectificative de la sécurité sociale, autrement dit projet de loi « retraites » et le mois d’octobre correspond au commençant de l’étude du Projet de loi de finances (PLF). Il est traditionnel que l’opposition dépose un grand nombre d’amendements pendant le PLF. Avec le PLFRSS retraites, ce sont les deux textes les plus emblématiques de cette première année de législature, dans lesquels les oppositions ont cherché à marquer leur différence.
      • Ces deux mois, à eux seuls, cumulent 37 354 amendements (presqu’autant d’amendements que l’intégralité des amendements déposés lors de la première année de la XVème législature).
    • Ces chiffres renforcent l’idée d’obstruction parlementaire par l’opposition : le dépôt d’un très grand nombre d’amendements freinant le déroulement du débat.
    • Pour le PLFRSS retraites, cela peut être également vu comme une réponse de la part de l’opposition (surtout le groupe LFI qui avait déposé le plus grand nombre d’amendements) à l’utilisation par le Gouvernement du 47-1 de la Constitution, restreignant le débat.
    • De même, pour le PLF, le Gouvernement a mis en jeu sa responsabilité (article 49 al.3 de la Constitution) ne permettant pas l’étude du grand nombre d’amendements déposés par les oppositions sur ce texte.
    • L’obstruction peut également être une technique de la majorité, avec un chiffre moins impressionnant, mais limitant tout autant les débats sur certains textes dans les niches d’opposition.
  • Sur 89 324 amendements déposés, il n’y a eu 34 554 de discutés, autrement dit moins de la moitié. Les autres étaient irrecevables, en traitement (non traités par la séance, pouvant venir du fait de l’article 49 al.3 ou de l’article 47.1), ou encore retirés avant d’être appelés.

Résumé

  • L’impression générale de cette année se confirme de façon objective par les chiffres : il y a environ 2,4 fois plus d’amendements, la première année de cette législature, que celle de 2017.
  • Les deux mois où il y a eu le plus de dépôt d’amendements sont le mois de février 2023 et le mois d’octobre 2022, avec les deux textes emblématiques (PLFRSS retraites, et PLF).
  • Dans le cas de ces deux mois, l’amendement est bien l’outil privilégié de l’opposition, déposant un grand nombre afin de perturber le déroulement du débat.
  • Dans une Assemblée à majorité relative, à la différence d’une majorité absolue, l’amendement devient l’expression première des députés qui reprennent leur rôle de législateur.

2. Les amendements déposés par groupe

Chiffres Renaissance :  8 779 amendements déposés en 2022 soit 9,83% de tous les amendements de cette année.
MODEM : 3 008 amendements déposés (soit 3,37%)
Horizons : 1 678 amendements déposés (soit 1,88%)
Ecologistes : 8 256 amendements déposés (soit 9,24%)
GDR : 3 761 amendements déposés (soit 4,21%)
LFI : 27 000 amendements déposés (soit 30,23%)
Socialistes : 7 484 amendements déposés (soit 8,38%)
LR : 1 5664 amendements déposés (soit 17,54%)
RN : 7 919 amendements déposés (soit 8,87%)
Source : Follaw.SV

Analyse

  • Tous les groupes – sans exception – ont plus déposé d’amendements qu’en 2017, même si pour certains l’augmentation est peu significative (en particulier Renaissance).
  • Attention certains groupes n’existaient pas en 2017 : comme le RN ou encore Horizons.
  • En outre, les rapports de force ont changé : le groupe LFI qui avait 17 députés en a aujourd’hui 75.
  • Concernant la majorité
    • Les statistiques des députés de la majorité en dépôt sont assez stables entre 2017 et 2022. Ils déposent à peu près le même nombre d’amendements.
    • Le groupe Renaissance a déposé presque autant d’amendements qu’en 2017 (8734). Le groupe reste actif avec plus de 8779 amendements (soit 9,83% des amendements) alors que les députés sont moins nombreux.
    • En revanche, la part globale des amendements déposés a baissé, puisse qu’en 2017, elle représente 23,24% alors qu’en 2022 elle n’atteint que 9,83%.
    • Le MODEM et HORIZONS ont déposé 3,37% et 1,88% des amendements de cette législature.
    • Les 3 groupes de la majorité ensemble représentent environ 15% des amendements déposés.
    • Certains ne sont pas de simples amendements rédactionnels, ayant de vrais impacts notamment financiers : comme l’amendement de Mathieu Lefevre et d’Aurore Berger sur les droits de succession.
    • On aurait tendance à penser que les amendements de la majorité pourraient être sur les textes en niche de l’opposition, mais on a pu voir à plusieurs reprises le MODEM et HORIZONS souhaiter faire entendre une voix différente de celle de Renaissance comme par exemple en déposant plusieurs amendements de groupe sur le PLFRSS retraites pour modifier le texte du Gouvernement. Cette pratique est assez surprenante pour des alliés, mais on peut comprendre la stratégie politique globale, en particulier, pour une majorité liée à un Président de la République qui ne peut pas se représenter en 2027…
  • Concernant l’opposition NUPES :
    • Sans surprise, le groupe qui détient le plus grand nombre de dépôt d’amendements est bien LFI. Environ 30% de tous les amendements de cette année.
    • Les NUPES (LFI, GDR, Ecologistes et Socialistes) ont déposé plus de 50% des amendements (52,06%).
    • Le groupe GDR a déposé plus d’amendements (1875 en 2017 et 3661 en 2022) mais reste à peu près stable sur la part globale sur tous les amendements déposés. On peut voir une certaine stabilité dans leur stratégie. C’est d’ailleurs le groupe d’opposition qui a le moins déposé d’amendements cette première année.
  • Les LR sont le 2ème groupe qui dépose le plus d’amendements avec 17,54%. Ils ont déposé 1,5 fois plus d’amendements qu’en 2017 alors qu’ils sont passés de 100 députés à 62…
  • Le groupe RN est en réalité très actif, ayant déposé plus de 7900 amendements, soit 8,87% des amendements globaux. Sachant que le RN a une stratégie, très disciplinée, même dans le dépôt. Les députés doivent faire valider au groupe leurs amendements, afin qu’ils soient tous cohérents et en accord avec la position de groupe…

Résumé

  • Tous les groupes ont plus déposé plus d’amendements qu’en 2017.
  • Les groupes de la majorité n’ont déposé à eux trois que 15% des amendements, et le groupe le plus actif est Renaissance.
  • Le premier groupe qui a déposé le plus grand nombre d’amendements est LFI avec plus de 30%.
  • Les LR est le second groupe le plus actif.

3. Les amendements adoptés

Chiffres
En 2022 : 6185 amendements adoptés (alors qu’il y en avait 6404 en 2017)
45,95% des amendements adoptés viennent du groupe Renaissance, 9,83% du MODEM et 7,03% de HORIZONS
Concernant l’opposition : LR 8,62%, socialistes 7%, LIOT, LFI et Ecolo 3,9%, GDR 2,26% et RN 2,04%
Source : Follaw.SV

Analyse 

  • Un amendement adopté est une modification votée en séance ou commission par les députés sur un texte. L’amendement a donc été défendu et a reçu une majorité pour son approbation.
  • Il y a moins d’amendements adoptés en 2022 qu’en 2017.
    • Au vu de l’augmentation du nombre d’amendements déposés en 2022, le nombre d’amendements adoptés – 6 185 – semble assez dérisoire.
    • En outre, même s’il y a une recherche de compromis entre députés, et des alliances de circonstance (certains groupes s’associent de façon surprenante et parfois contre-nature), cela ne semble pas avoir d’impact sur les chiffres d’adoption des amendements par rapport à 2017.
  • Sans surprise, la majorité a le plus grand nombre d’amendements adoptés.
    • Renaissance, seul, en a 2 842 amendements. Mais il en avait 3 841 en 2017. Il arrive donc moins à faire voter ses amendements qu’en 2017, lors de la majorité absolue.
    • Les 3 groupes de la majorité ont plus de 62, 81% des amendements adoptés.
    • Mais en 2017, les amendements du groupe Renaissance comptabilisaient à eux seuls presque 60% des amendements adoptés…
    • Le première groupe de la majorité a donc besoin de ses alliés et constitue ainsi une majorité plurielle.
    • On peut donc penser qu’il y aurait une plus grande place à l’adoption des amendements de l’opposition. En tout cas, on peut noter qu’il y a moins d’hégémonie du premier groupe de la majorité.
  • LFI qui a déposé le plus d’amendements a un retour sur investissement extrêmement faible avec 3,9% de ses amendements adoptés.
    • Mais c’est tout de même plus élevé qu’en 2017 où ce n’était que 0,83%.
    • On peut donc se dire que la stratégie de LFI confirme l’idée d’une stratégie d’obstruction : le plus grand nombre possible de dépôt d’amendements sur un texte, sans nécessairement avoir pour objectif final leur adoption. Cela leur permet de montrer une ligne politique frontale d’opposition au Gouvernement et à la majorité.
    • En revanche, même si les résultats du groupe LFI semblent contestables au niveau législatif, la stratégie parait efficace sur les réseaux et les médias. Ils utilisent le travail parlementaire comme un tremplin médiatique.
  • Les LR ont plus d’amendements adoptés avec 533 amendements (8,62%) qu’en 2017 (360 amendements soit 5,62%). Le groupe LR dit « pivot » a l’air donc d’avoir plus d’impact sur cette législature que sur l’ancienne.
  • Le RN, malgré la théorie du cordon sanitaire, a 126 amendements adoptés, soit 2,04%. Mais il faudrait affiner les amendements pour vérifier si la plupart ne sont pas des amendements identiques à d’autres groupes (amendements lobby).
  • LIOT, qui n’a que 21 députés, a autant d’amendements adoptés que LFI.

Résumé

  • Ce qui peut paraitre contre-intuitif, malgré la recherche de compromis et les alliances de circonstance, il y a un peu moins d’amendements adoptés en 2022 (6 185) qu’en 2017 (6 404).
  • Tous les groupes ont eu des amendements adoptés, même les RN malgré la théorie du cordon sanitaire.
  • L’Assemblée ne semble plus être une simple chambre d’enregistrement, puisque même les groupes d’opposition ont un meilleur taux d’amendements adoptés. Ainsi, loin d’être un droit accessoire du député, une simple technique de correction, le droit d’amendement reprend aujourd’hui tout son sens, les parlementaires ayant réellement la possibilité de « faire la loi ».

4. La recevabilité des amendements

Chiffres
En 2022 : 19 994 amendements ont été déclarés irrecevables (tout fondement confondu)
11 063 amendements irrecevables sur le fondement de l’article 40
LFI a eu 3 289 amendements irrecevables article 40, soit 29,73% des amendements irrecevables article 40
LR en a eu 3 273, soit 29,59%
HORIZONS : 238, soit 2,15%
MODEM : 3, 32%
GDR : 4,08%
LIOT : 5,22%
RN : 6,18%
RE : 7,27%
Source : Follaw.SV

Analyse

  • Certaines règles doivent être respectées pour qu’une proposition de loi (ou un amendement) puisse être examinée en commission et en séance. C’est ce qu’on appelle « la recevabilité ».
    • Un amendement irrecevable ne peut donc être ni étudié, ni débattu, ni voté.
    • Il existe différents types d’irrecevabilités d’un amendement : financière (article 40), cavalier législatif (article 45), domaine de la loi (articles 37 et 41 de la Constitution), LOLF, entonnoir, etc.
    • Environ 20 000 amendements ont été considérés comme irrecevables sur les 89 000.
    • Alors qu’en 2017, il y en avait 2 089 pour environ 3 700 amendements. Le nombre d’irrecevabilité a donc énormément augmenté de façon objective entre la première année de la XVème législature et celle de la XVIème.
  • L’irrecevabilité la plus connue est celle de l’article 40 de la Constitution.
    • Article 40 : « les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique ».
    • L’article 40, qui demeure l’un des rares articles de la Constitution resté inchangé depuis 1958, constitue une limitation centrale du pouvoir d’initiative des parlementaires, sous couvert de justification financière. En effet, seuls les parlementaires sont visés, conformément à l’esprit du parlementarisme rationalisé. 
    • L’étude d’une charge s’apprécie de manière juridique et non budgétaire. Ce n’est donc ni l’impact financier ni la sincérité du gage qui sera retenu pour la qualification.
    • C’est également l’irrecevabilité la plus utilisée et la plus contraignante : Plus de 11 000 amendements irrecevables sur ce fondement.
  • Étude des chiffres par groupe
    • Le Président de la Commission des finances est un député d’un groupe d’opposition depuis la réforme constitutionnelle de 2008.
    • Pour la première fois, le Président, Éric Cocquerel, appartient au groupe LFI. Mais on peut voir que le groupe LFI détient le record d’amendements irrecevables (même si les 27 000 déposés, 3289 ne semblent pas un ratio énorme). Ils n’avaient d’ailleurs que 9% des amendements irrecevables en 2017. Ils ont donc changé de pratique.
    • Le deuxième groupe sont les LR avec 29,59%. En 2017, ils détenaient déjà le record avec plus de 33% des amendements irrecevables article 40 (mais avec seulement 681 amendements). On peut donc se demander si ce n’est pas dans la pratique des députés LR de ne pas se restreindre dans le dépôt de leurs amendements même s’ils savent que potentiellement ils ne respecteront pas cette règle… Déposer un amendement même irrecevable permet tout de même de communiquer dessus…
    • Le meilleur élève est HORIZONS avec 2,15%
    • Tous les autres se trouvent entre 3 à 7% d’amendements irrecevables.

Résumé

  • Environ 20 000 amendements ont été considérés comme irrecevables sur les 89 000. Leur nombre a explosé par rapport à la première année de la XVème législature.
  • L’irrecevabilité de l’article 40 reste la plus contraignante avec 11 000 amendements irrecevables sur ce fondement.
  • Les deux groupes qui sont les plus sanctionnés sont LFI et les LR.
  • La plupart des autres groupes sont assez proches entre 3 à 7% des amendements, sachant que HORIZONS n’a que 2,15% des amendements irrecevables article 40.

5. Les amendements du Gouvernement

Chiffres
730 amendements déposés (soit 0,82%), ce qui est un peu moins qu’en 2017 (798).
323 amendements ont été adoptés (alors que 701 avaient adopté en 2017)373 amendements ont été discutés
103 ont été retirés
33 ont été déclarés irrecevables
Source : Follaw.SV

Analyse

  • Du fait de la rationalisation du parlementarisme, le Gouvernement est doté d’un droit d’amendement plus important que celui accordé aux parlementaires. Il dispose d’une plus grande liberté d’action, n’étant pas par exemple soumis directement à l’article 40 de la Constitution, ni au délai de dépôt.
  • Le Gouvernement peut aussi bien en déposer sur les projets de loi comme sur les propositions de loi de la majorité et de l’opposition, sans avoir besoin de joindre une étude d’impact.
  • Le Gouvernement a déposé un nombre à peu près similaire que la première année de la XVème législature, (une soixantaine de moins). Il garde une pratique assez constante.
  • En revanche, le nombre d’amendements adoptés a considérablement chuté. Moins de la moitié des amendements déposés ont été adoptés, alors que la plupart de ceux de 2017 l’avaient été.
  • On remarque donc que la majorité relative met directement en difficulté le Gouvernement dans les amendements qu’il propose.
  • Un bémol : seulement 373 amendements ont été discutés. Le ratio de 323 amendements adoptés devient donc meilleur lorsque l’on prend en compte cette donnée. On peut également se demander pourquoi le Gouvernement n’a souhaité (ou pu) discuter que 373 amendements sur les 730 déposés. Les utilisations des articles 49 alinéa 3 de la Constitution et 47-1 peuvent peut-être être une piste. Pour en être certain, il faudrait regarder plus en détail, quand et quels sont les amendements n’ayant pas été discutés…
  • 103 amendements ont été retirés (donc non soumis au vote) alors qu’il y en avait 50 en 2017.
  • 136 sont restés en traitement. Ils n’ont pas été étudiés en séance.

Résumé

  • Sur 730 amendements déposés, seulement 323 ont été adoptés, moins de la moitié.
  • En revanche, sous la XVème législature, fort du fait majoritaire, la plupart de ses amendements avaient été adoptés (701 pour 798 déposés).
  • C’est donc en étudiant les chiffres des amendements du Gouvernement que l’on voit le mieux les difficultés du pouvoir exécutif face à une majorité relative. En découle le renforcement du pouvoir législatif, et ceux des députés qui peuvent s’opposer à la volonté du Gouvernement, malgré le Parlement rationnalisé de la Vème République.

Conclusion générale 

La situation exceptionnelle dans laquelle se trouve l’Assemblée actuellement s’exprime à travers les statistiques de amendements. Cette législature, en majorité relative, est donc bien en rupture avec les précédentes.

Le Gouvernement semble bien en difficulté concernant l’adoption de ses amendements.

Les groupes parlementaires ont gagné en poids politiques et ont développés des stratégies souvent innovantes et parfois singulières.

Ainsi, loin d’être un droit accessoire du député, une simple technique de correction, le droit d’amendement reprend aujourd’hui tout son sens, les parlementaires ayant réellement la possibilité de « faire la loi ».

Même si on a l’impression que la machine est un peu grippée par rapport au rendement auquel elle a été habituée, l’Assemblée n’en est pas pour autant bloquée. La majorité relative semble même contenir l’inflation législative, tout en permettant l’adoption de mesures plus consensuelles (excepté lorsque que le Gouvernement utilise le 49 al3…). Autrement dit, sous cette législature, l’Assemblée ne peut plus être vue comme une simple chambre d’enregistrement.

Contact : al@saper-vedere.eu

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